Hunger [Jade]
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Hunger [Jade]

@ Keegan Jones

Keegan Jones
WENDIGO
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Lun 26 Fév 2024 - 20:48
Je m’enroule dans mon manteau pour me protéger du vent froid qui souffle dans les ruelles nocturnes d’Hastings. Je visite pour la première fois ce quartier et j’ai l’impression d’être un peu revenu chez moi, dans la zone la moins recommandable d’une trop grande ville qui la délaisse. Franchement curieux choix pour un date Tinder, mais on fait avec ce qu’on a. J’espère au moins qu’il ressemblera à ses photos. Il est plutôt pas mal, dans le genre trentenaire banal. Probablement pas le rencard du siècle, mais ce sera déjà bien d’oublier quelques temps toute la merde qui me court après.

Serrant toujours mon manteau contre moi je remonte une rue puis une autre, cherchant le bar où j’ai rendez-vous avec le fameux Augustin. Je croise quelques personnes, certaines déjà bien entamées par l’alcool ou autres, d’autres qui trainent, sans doute pour un commerce très typique de ce genre d’endroit. Je regarde le panneau indiquant le nom de la rue, plissant les yeux pour distinguer les lettres faiblement éclairées par la lumière jaunâtre des lampadaires, puis je tourne, arpente un instant les pavés à peine lavés par la pluie puis tombe nez à nez avec un énorme néon rose indiquant ‘Succubus K’. Je sors mon téléphone pour checker l’heure et découvrir que je suis à peine en retard. Un putain d’exploit pour quelqu’un qui découvre ce dédale froid pour la première fois. Je pousse la porte et me fais aussitôt assaillir par la musique, les bruits de la fête, les voix des gens qui parlent et les claquements de verres qu’on trinque. L’odeur de l’alcool est forte et se mélange un peu à celle du tabac froid et de tout un tas d’autres choses que je ne saurais pas vraiment distinguer. L’ambiance est sympa, festive, un peu trop chargée des hormones des gens qui draguent après avoir bu leur troisième verre et de-ci de-là des couples queer se roulent des pelles sans gêne. Je comprends mieux le choix de ce bar pour un premier rencard finalement.

La porte se referme derrière moi, avalant le monde réel et j’avance dans la pièce en cherchant parmi les visages des fêtards la personne que je rejoins. Mon regard finit par se poser sur lui, il me voit aussi, me sourit et me fait signe. Il est comme sur sa photo, en plus pâle peut être, ou alors les lumières ne sont pas très flatteuses. Je le rejoins et on se salue. Il a l’air aussi content que moi de tomber sur quelqu’un dont les photos ne sont pas trafiquées, mais il a l’air un peu gêné, tendu, bien plus que par message, mais je n’y prête pas plus attention que ça. Je lui propose d’aller chercher à boire et il opine. Il n’a pas vraiment l’air à son aise. Je quitte la table et me dirige vers le bar, sinuant entre quelques gens qui discutent ou se tripotent, et atteins le comptoir. Dès que la barmaid a fini de servir deux autres clients, je m’approche, élève la voix par-dessus la musique et dis :

« Salut, deux pintes s’il te plait. »

Je pose un billet sur le comptoir en échange des deux verres frais et repars avec vers notre table. Même depuis l’autre bout de la salle j’ai l’impression qu’il ne va pas fort. Je ne saurais pas trop dire ce qui cloche, une nervosité excessive peut-être, une arrière note de panique dans sa gestuelle. Même quelqu’un à la timidité excessive ne serait pas aussi stressé. Je pose les deux pintes sur la table déjà un peu collante et me glisse sur la banquette pour m'asseoir à côté de lui. Il n’a même pas levé les yeux quand je suis revenu et fixe un point invisible sur le sol. Je le dévisage et constate qu’il a l’air encore un peu plus pâle que tout à l’heure, si c’est possible. L’air inquiet, je l’observe une seconde ou deux de plus, me demandant s’il est malade. Il tremble un peu. Soucieux, je demande :

« Est-ce que ça va ? » Pas de réponse. Il serre les poings, comme s’il essayait de se contrôler. Vraiment étrange. Il marmonne quelque chose. Je me penche un peu pour entendre en demandant : « Quoi ?
- Je crève la dalle. »

Sa voix est éraillée, comme si ça lui coûtait de parler. Je veux bien que la faim soit quelque chose de franchement terrible parfois, mais là c’est un poil excessif pour une personne lambda. Ça me rappelle de mauvais souvenirs, mais je les balaie. Je dois surement être tombé sur un gars un peu louche qui devient barjot quand il est en hypoglycémie, ou alors il a pris une drogue qu’il a mal supporté. Triste, mais typique. Ce qui commence à être sûr c’est que je vais sans doute rentrer seul chez moi après cette bière. Ça m’apprendra à utiliser des applis de merde. Haussant les épaules, je demande :

« Ils servent à manger ici ? »

Ses yeux se lèvent vers moi, et comme l’écho d’un passé pas si lointain j’y vois une faim terrible et inhumaine, comme je l’ai vu dans les yeux de Silas. Mon cœur s’accélère et en un instant il se jette sur moi, me coinçant contre la banquette. Surpris et paniqué, j’essaie de le repousser, me débats de plus en plus violemment, mais il tient bon. Dans la débâcle, je file un coup de pied à la table, renversant les deux pintes qui se mettent à se déverser sur le sol, éclaboussant tout. La lumière de la salle illumine l’espace d’une seconde deux pointes blanches dans sa bouche et il force encore pour s’approcher de ma gorge mais j’arrive à garder mon avant-bras entre nous. Subitement une douleur vive se fait sentir dans mon bras alors que ses mâchoires se referment dessus. Le sang coule et j’essaie de me libérer mais ça fait putain de mal. La panique me gagne et mon cœur s’accélère encore.

À tout moment, je risque moi-même de perdre le contrôle. À tout moment, je risque de me transformer en monstre pour me défendre. Ici, devant une salle bondée.

Putain non.
Pitié, non.
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Jade Fletcher
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Jeu 29 Fév 2024 - 0:14

Hunger

feat. Keegan Jones
La nuit est plutôt calme. La lune, cachée par quelques nuages sombres, s’approche de ses derniers croissants avant que tout le cycle ne recommence une nouvelle fois. D’aucuns diraient à l’infini, mais les astronomes affirment qu’un jour tout prendra fin. A raison de quelques centimètres par an, l’astre s’éloigne jusqu’à nous quitter dans une éternité que même vous, vampires, n’êtes pas capables d’appréhender.
Mais qu’importe le futur si on ne fait pas attention au présent. Et ce soir, la nuit est calme.

Comme d’habitude, il y a un peu de chahut au Succubus, mais pas spécialement d’effervescence comme il peut en avoir les soirs d’assemblée générale. Au total, une quinzaine de têtes environ, réparties entre le comptoir, les tables de la salle et les alcôves plus discrètes. Quelques habitués dont certains font trinquer avec allégresse les bouteilles opaques qui dissimulent leur contenu carmin, d’autres clients plus occasionnels qui profitent simplement d’une soirée ici comme ils pourraient en profiter partout ailleurs.
Mais pas tant que ça non plus. Le Succubus K est un lieu unique en ville. Ici, tout le monde est le bienvenu, et ce critère d’inclusion s’étend même au-delà des considérations humaines. Un lycanthrope pourrait rentrer et commander une bière sans se faire bousculer par la horde de dents-longues dont les fesses sont le lierre des tabourets.
Les seuls qui n’ont pas leur place entre ces murs, au final, ce sont les emmerdeurs. Il en existe de toutes sortes. De toutes les tailles et de toutes les couleurs. On en reconnaît certains à leur port de menton altier et aux regards qu’ils jettent aux autres clients qui ne leurs ressemblent pas, comme s’ils attendaient qu’ils leur sautent dessus pour pouvoir exulter tout le mépris qu’ils emmagasinent un peu plus chaque seconde ; ceux-ci la devanture se charge généralement de les repousser. D’autres sont reconnaissables par leur démarche belliqueuse. Les épaules tirées vers l’arrière, on peut les voir sonder la salle comme des radars à la recherche de conflits pour allumer leurs mèches ; eux aussi sont vite repérés et mis dehors aussi vite qu’ils sont entrés dès lors qu’ils lèvent le poing.
Or, il arrive que certains soient plus malveillants, que leurs intentions représentent un venin plus insidieux et d’autant plus dangereux. De par sa philosophie, le Succubus a pour habitude d’accueillir des âmes mises en déroute par les aléas trop violents d’une vie. La plupart du temps, ces âmes souffrent et pâtissent d’une naïveté dont d’autres cherchent à profiter. Ce sont les pires d’entre tous, et tu voues à l’égard de ces serpents une haine viscérale.

La faute n’est cependant pas inscrite sur les visages, et nul ne saurait être puni pour des fautes qu’ils n’ont pas commis. Alors tu accueilles tout le monde sans distinction, parfois malgré les pressentiments amers qu’ils t’inspirent.
Et en parlant d’amertume, le type tendu comme une arbalète qui vient de rentrer pour foncer directement à une table libre dans un coin t’en ferait presque grimacer. Sa tête ne t’est pas complètement inconnue ; il est déjà venu, mais pas assez souvent pour que tu retiennes quoi que ce soit de ses passages. Seulement, c’est lorsque tu vois rentrer quelques minutes après un minet complètement inconnu pour se diriger à sa table que les alarmes commencent silencieusement à s’allumer dans ta tête. Il vient au bar commander deux boissons que tu lui sers en masquant ta méfiance derrière un masque de flegme.
Il revient à sa table avec ses verres en main. Il aura suffi d’une dizaine de secondes hors de ta vigilance, le temps de servir d’autres clients, pour que ton pressentiment devienne une réalité. C’en est presque effrayant de te dire que tu caches peut-être un don de préscience.

Enfin, c’est le bruit du mobilier qui chahute qui fait retentir l’ultime alarme. Tu tournes rapidement la tête pour reconnaître sans aucun doute un vampire en pleine crise de soif. « Fait chier, » te siffles-tu entre les dents, persuadée que tu aurais dû mieux l’anticiper. « Ziggy ! » Tu te précipites pour faire le tour du bar, mais chaque seconde compte, alors tu interpelles un pilier qui, de toutes façons, ne t’avait pas attendu pour intervenir.
Le grand brun filiforme aux traits d’eye-liner qui rendraient jalouse la moitié des femmes de la salle saute de son tabouret et en un instant se retrouve derrière le jeune immortel. Il attrape un de ses bras et le tire en arrière, bientôt assisté par son ami Beau. A eux deux, ils parviennent à extirper la victime des crocs de ce qui t’a tout l’air d’être un nouveau-né. Tu soupires en les rejoignant, sentant le litre de bière à écumer sous les semelles de tes bottines.
Soulagée que l’incident n’ait pas viré au drame, tu te hisses sur la pointe des pieds pour souffler quelques mots à l’oreille de Ziggy. « Vous l’emmenez à la cave et vous lui filez à boire avec ce qu’il vous reste pour qu’il redescende, va falloir qu’on discute un peu avec lui avant de le laisser partir. J’irai chercher une nouvelle poche quand j’aurai géré son rencard. » Sans discuter et sous le regard soucieux des clients les moins avertis, le trouble-fête est escorté en dehors de la salle.
Ca, c’est une des raisons pour lesquelles tu hais le Cercle. Les anciens préfèrent que ce genre d’incidents se produise plutôt que de les éviter en organisant des distributions de sang. Comme ça, ça leur permet de punir et faire des exemples. Ca leur permet d’insister leur l’importance de leurs dogmes et de leur pouvoir, comme s’ils ne les maintenaient pas artificiellement. Vivement que vous les renversiez.

Tâchant ensuite d’éviter autant que possible la flaque mousseuse qui continue d’être alimentée par les gouttes ambrées tombant du rebord de la table, tu t’approches du pauvre homme après avoir au préalable redressé les deux verres déchus. Tu t’accroupis doucement à côté de lui en faisant de ton mieux pour ignorer le sang qui coule des plaies de son avant-bras. Les entailles n’ont pas l’air spécialement profondes : il survivra sans peine. « Ça va ? » lui demandes-tu finalement en lui tendant un morceau d’essuie-tout attrapé au passage.
Tu entends son rythme cardiaque encore affolé par l’incident, et tu te demandes à quel point il a compris ce qu’il vient de lui arriver. Il a l’air vraiment troublé, mais tu sens autour de lui cette espèce d’aura étrange que tu as l’habitude de repérer chez les personnes hors du spectre du commun. « On a une trousse de secours à l’arrière, t’es capable de me suivre jusque là-bas ? »


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@ Keegan Jones

Keegan Jones
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Ven 1 Mar 2024 - 14:35
La salle semble être devenue silencieuse, ou alors je n’entends plus rien d’autre que la panique qui me saisit les entrailles. Il s’accroche. J’essaie de me dégager. Cette lutte semble durer une année.

Des mains le saisissent et le tirent en arrière avec force. Sa mâchoire se resserre un instant, douloureusement, comme un animal affamé qui refuserait de se faire voler sa proie. Il s’agrippe, fort, se débat à son tour, puis finit par lâcher. Mon bras me fait un mal de chien. Les deux inconnus éloignent le taré et je peux entrevoir dans les lumières tamisées du bar son expression affamée et à la limite du délire ou de la souffrance. Qu’est-ce que c’est que ce bordel ? L’espace d’un instant j’évalue la possibilité qu’il soit comme moi, mais la balaye puisque ça semble différent. Et parce que ça me fout les jetons de pouvoir être un jour à sa place. Cela dit, je ne suis pas vraiment un grand expert en wendigo, donc ça reste toujours une terrible possibilité. Les gens autour semblent plus ou moins surpris, certains mécontents, mais très peu choqués ou scandalisés. L’agresseur, les deux gars qui l’ont dégagé et même la barmaid qui s’approche semblent collés par une espèce de sensation bizarre qui me met mal à l’aise. Ou alors n’est-ce qu’un contre coup du choc, un malaise généralisé. Difficile à dire.

Toujours collé au fond de la banquette à présent imbibée de bière, je perds une ou deux secondes de ma vie dans un état de stupeur, le cœur battant. La voix de la barmaid me ramène un peu à la réalité. J’acquiesce vaguement à sa question, plus par habitude que par réel assentiment, et attrape l’essuie-tout qu’elle me tend en marmonnant un : « Merci ». J’appuie le papier absorbant sur la plaie et il se teinte assez vite de carmin. Je savais qu’on pouvait potentiellement tomber sur des gars chelous sur les applis, mais là on atteint des sommets. Je suis presque soulagé d’apprendre qu’ils ont de quoi donner les premiers soins, il ne manquerait plus que ça s’infecte. Je marmonne un « Oui, ça ira. » et m’extrait de la banquette pour la suivre jusque dans la réserve, sous le regard curieux des autres clients et clientes. Clairement, on a dû être l’attraction de leur soirée, la petite anecdote qu’ils raconteront pendant les dix prochaines années à venir.

On traverse le bar et je la suis à travers une porte, loin de la fête qui commence doucement à reprendre ses droits. Déjà j’entends les voix murmurantes des gens qui commentent ce qu’il vient de se passer. Grand bien leur fasse. Une fois dans l’autre pièce et loin des regards indiscrets, je m’adosse au mur et écarte le sopalin maintenant bien imbibé de la plaie qu’il dissimule, révélant une marque de morsure. Une marque de morsure avec deux piqûres nettes bien plus profondes que les autres. Je fronce les sourcils une seconde en inspectant la plaie. J’ai l’impression que ça ne ressemble pas vraiment à une morsure normale. Depuis que j’ai découvert que des monstres se promenaient parmi les humains, je ne me suis jamais vraiment posé la question de savoir si d’autres légendes pouvaient être vraies ou non. Pourtant, dans ce bar, face à la marque nette dans ma peau, je m’interroge. Ou bien peut-être que je suis parano. Qu’est-ce qui est le plus probable : l’idée qu’un gars ait pété un câble ou bien celle que peut-être des légendes soient vraies ? Ou bien s’agit-il d’un autre type de wendigo ? Putain, je suis complétement paumé. Dans ce genre de moments, j’en viens presque à regretter de n’avoir personne vers qui me tourner, quelqu’un qui pourrait me donner quelques réponses. Je lève mon regard vers la barmaid. Elle ne semble pas forcément plus troublée que ça par ce qu’il vient de se passer. En soi, c’est aussi un peu étrange. Dans quoi je suis tombé ?

« Ça vous arrive souvent que des gens essaient d’en bouffer d’autres dans votre bar ? Ça a pas l’air de plus vous surprendre que ça. »

L’intonation se veut curieuse et légère, masquant plutôt bien le doute et l’incertitude qui me contaminent. Je ne pense pas être quelqu’un de très méfiant de base, si je l’avais été j’aurais sans doute évité quelques problèmes, et pourtant je commence quand même à avoir de mauvais pressentiments. Trop de choses semblent étranges, et je n’ai pas avalé la moindre goute d’alcool qui pourrait masquer cette impression.
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@ Jade Fletcher

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Sam 2 Mar 2024 - 0:40

Hunger

feat. Keegan Jones
Le type est pâle. Livide même, limite plus que toi. Il saigne mais tu doutes que ça soit l’anémie qui lui rende le teint si clair. Bon, la peur doit jouer un rôle conséquent dans le phénomène, mais tu serais tout de même prête à parier que le bougre n’aime pas beaucoup le soleil. Après tout il dégage bien cette aura de particularité, mais vu sa réaction à l’attaque de ton congénère, il n’a pas l’air de lui-même appartenir à votre espèce. A moins que si, et qu’il soit lui aussi un très jeune à qui l’on n’aurait rien appris. Après tout ça ne serait pas si étonnant que ça : depuis que le Cercle est affaibli, certains en profitent pour semer des infants un peu partout sans s’en occuper, juste parce qu’ils le peuvent. Pourtant, il n’a pas l’air de particulièrement souffrir de la soif.
Non, décidément, il est franchement bizarre ce mec. Enfin, pas que ce soit vraiment sa faute non plus, mais tu as l’impression de ne pas avoir toutes les pièces pour compléter le puzzle. Peut-être qu’en discutant tu en apprendras plus. Tu l’espères, parce que tu n’as vraiment pas envie d’aller fouiner dans ses souvenirs pour retrouver le potentiel coupable de sa Première Mort.

Bon, au moins il peut marcher tout seul. Il est un peu plus dégourdi qu’il en a l’air. Tu l’escortes donc jusque dans l’arrière-boutique, petite pièce sans fenêtre aux murs cachés par des étagères en ferraille basiques, cartons et autres fûts. Un dernier regard en arrière et tu lâches un soupir d’exaspération en pensant au temps que tu vas devoir passer pour éponger la bière renversée. A moins que tu le fasses faire au nouveau-né, histoire de lui apprendre un peu les bonnes manières ? Tu verras, tout dépendra de l’état dans lequel tu le retrouveras après son petit séjour à la cave.
En passant la porte qui sépare la salle principale de celle-ci, tu attrapes une chaise au dossier cassé en attente de réparations et la présentes au blessé pour qu’il se mette à l’aise le temps que tu attrapes la trousse de premiers soins perchée au sommet d’une des étagères.
Il n’a pas l’air si traumatisé que ça, puisqu’il se permet une remarque presque sarcastique. Enfin, pas non plus au top de la confiance. Ca ressemble plus à une tentative à moitié fructueuse de se détendre lui-même. Tu lèves les yeux au ciel un court instant en affichant un sourire nonchalant avant d’ouvrir la trousse de secours. « Plus que ce que tu images, » lui réponds-tu comme si c’était une plaisanterie tout en imbibant une compresse de désinfectant. En réalité c’est tout à fait sérieux. Certains de tes congénères ne savent pas se tenir, et ça ne sera pas la première fois que tu verrouilleras les souvenirs d’une victime pour éviter quelques menues complications.
« Attention ça va piquer, » reprends-tu juste avant de coller le linge contre la plaie ensanglantée ; c’est un grand garçon, il devrait y survivre. C’est vrai que l’autre con ne l’a pas raté, il lui a laissé une jolie emprunte de mâchoire sur le bras qui risque de lui causer quelques interrogations au réveil demain. Enfin, tu dis ça mais le saignement s’est déjà arrêté. Tu n’es pas vraiment infirmière, mais aussi bonne soit cette nouvelle pour lui, ça n’est pas normal pour un humain normal. Sa peau aussi est plus froide, mais pas autant que celle des longues-dents. On dirait une sorte de… demi-vampire, parce qu’il n’est définitivement pas humain, mais pas tout à faire comme vous non plus.
D’ailleurs il devrait aussi avoir remarqué la froideur de tes mains, mais tu as maintenant l’habitude de la justifier par une trouble de la circulation. Enfin peu importe, il n’en aura plus de souvenir d’ici quelques minutes.
Enfin, tu mets fin à ce calvaire nécessaire en éloignant la compresse de son bras et en l’enroulant rapidement d’un bandage. Tu es directe et assez peu patiente, mais pas non plus sadique. « C’est pas un événement très rare les bagarres dans les bars. Nous, comme on accueille une clientèle un peu plus excentrique, forcément… la violence l’est un peu aussi. » Affairée sur le bandage de l’inconnu mystère, tu ne le regardes même pas dans les yeux, mais sur ton visage se dessine une certaine tendresse lorsque tu écoules tes mots. « Des fois, certains sont un peu raides en arrivant, ils prennent des trucs qui les font triper bizarrement. » Tu hausses les épaules, et enfin retrouves le regard de ton patient. « Enfin ça arrive quoi. C’est un peu le risque à prendre quand on décide d’accueillir tout le monde sans apriori. »


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@ Keegan Jones

Keegan Jones
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Dim 3 Mar 2024 - 10:00
Je m’attendais à une soirée sympa et légère dans une ambiance festive et en bonne compagnie. Je me retrouve dans une pièce obscure remplie de tout un tas de trucs stockés là qui attendent de prendre la poussière, le bras blessé. Au moins la barmaid est attentionnée et essaie de m’aider. Pas tout à fait le type de compagnie que j’attendais mais c’est déjà ça.

Je m’assois sur la chaise qu’elle a ramené tandis qu’elle récupère la trousse de secours, en répondant à ma question avec une plaisanterie. J’aurais préféré une vraie réponse, mais les choses sont rarement aussi simples. Sans un mot, je la laisse nettoyer la plaie et grimace un instant en sentant la piqure mordante de l’antiseptique qui se glisse dans la blessure. Le désinfectant semble glacé, tout comme les doigts de la personne qui l’applique. Il ne fait pas si froid ici pourtant. Elle commence le pansement en emballant la blessure avec des gestes suffisamment assurés pour que je m’interroge sur le nombre de fois où elle a fait ça. Dans quel genre de bar a-t-on besoin de savoir soigner les plaies ? Sa voix perce le silence qui s’était installé dans la pièce et me livre l’explication la plus cheloue du monde. A quel moment est-ce qu’on peut apparenter ce qu’il vient de se passer à une bagarre de bar ? Elle a cru que j’étais bourré pour croire un truc pareil ou bien est-ce qu’elle est juste la personne la plus perchée de cette ville ? Est-ce une tentative d’humour ? Si c’est le cas, alors la dissonance cinglante avec la froideur sombre de la pièce a étouffé le côté drôle de ses paroles. Ou peut-être que je suis plus ébranlé que ce que je pensais. Son autre explication tient beaucoup plus la route, et l’idée qu’Augustin ait pris une drogue peu recommandable avant de venir semble infiniment plus logique. Je soupire. Tout à fait probable. Avoir enfin un début d’explication vaguement logique fait se relâcher une tension dont je n’avais pas tout à fait conscience. Pas mal de gens picolent ou prennent des trucs pour ne pas être trop stressé avant un rencard. Une idée de merde, mais une idée de merde hélas courante. Il a quand même dû avoir un sacré bad trip pour que ça tourne ainsi, et les choses auraient pu salement dégénérer si j’avais perdu les pédales. Rien que d’y penser ça me colle un frisson de terreur. Les conséquences auraient été apocalyptiques. Je recentre mon attention sur l’infirmière improvisée pour éviter de penser au pire. Elle a sans doute raison. Je hausse les épaules et réponds :

« Ouai, sans doute. » Une ou deux secondes de silence s’écoule tandis qu’elle termine le bandage, puis je demande : « Vous allez faire quoi pour lui ? Appeler une ambulance ? Ça a quand même l’air d’être un sacré bad trip. »

Je suis loin d’être un expert en drogues, mais si on en est au point de se mettre à mordre des gens, c’est sans doute que les choses ont mal tournées. Vraiment mal tournées. Mais est-ce que ça n’attirerait pas l’attention des flics ? Si ce bar est si coutumier que ça de ce genre de problèmes, ce ne serait sans doute pas terrible pour leur business. Et les flics n’ont jamais été vraiment très sympa avec les gens qui peuplent ce genre de lieu. Est-ce que les gens de ce bar laisseraient quelqu’un faire une overdose pour éviter d’avoir des problèmes ? J’espère bien que non. Malgré tout, c’est très étrange. Est-ce réellement si fréquent que ça de voir des gens en mordre d’autres ? Est-ce un effet secondaire de la dernière drogue à la mode ?

« Et c’est ça votre théorie ? Des gens se droguent puis se mettent à mordre des gens ? »

Je ne sais même pas pourquoi je demande ça, sans doute pour remplir le silence avec du bruit, pour faire taire la peur de ce qui aurait pu se passer. A chaque fois que je la ferme et que j’entends mes pensées, tout ce qui me vient c’est l’image terrible de moi qui me transforme en monstre pour me défendre et tout dévorer.
C’est tout de même terrible d’avoir plus peur de soi-même que du toxico qui a essayé de me bouffer.
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@ Jade Fletcher

Jade Fletcher
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Lun 11 Mar 2024 - 13:26

Hunger

feat. Keegan Jones
Ton patient de la soirée n’a pas l’air de mordre – sans mauvais jeu de mot – à ton explication. C’est peu commode de sa part, mais en même temps, comment lui en vouloir ? Elle est complètement bidon et lui n’est pas assez alcoolisé pour mettre cette impression très réelle sur le dos de son ébriété.
Pas que ça marche mieux d’habitude, mais quand les victimes sont éméchées, il est toujours plus facile de les désinformer. Ta position t’oblige à être une professionnelle du gaslighting, et ça ne t’enchante pas vraiment. A chaque nouveau cas qui se présente, tu te poses la question : est-ce que la fin justifie vraiment ces moyens ? Le respect de l’être humain, ou plutôt de la conscience humaine, est au cœur de tes principes. Mentir et manipuler, ça n’est pas vraiment ce que tu appelles du respect, et tu doutes à chaque fois du bienfondé de la manœuvre, même si la cause est noble. Après tout, c’est pour protéger que tu fais ça : à la fois lui, le nouveau-né et plus généralement toute votre communauté.
Il vaut mieux ne pas attirer l’attention plus que de raison. Que ce soit la police, le cercle ou tu-ne-sais quelle autre instance fascisante, rien de bon ne peut venir de l’extérieur : vous représentez une menace trop importante pour ne pas être sévèrement réprimée. Tantôt prédateurs sanguinaires, tantôt partisans du chaos, tous les prétextes sont bons pour piétiner votre flamme.

La question du jeune homme te fait alors sourire un peu tristement. « Pour qu’il se fasse ficher comme toxico par les autorités ? réponds-tu sans attendre à son histoire d’ambulance. Non, on va s’en occuper nous-même. On se doit de protéger nos semblables. » A nouveau, ton expression se teinte d’une lueur de tendresse. Tu es paradoxalement tout à fait sincère. Certes, il n’est pas exactement question de toxicomanie, mais la problématique reste la même : ne pas se faire les chiens de garde d’un système qui ne sait que broyer. Quand tu parles d’un semblable, tu parles d’un vampire mais pas seulement : tu parles aussi d’un type paumé et au bout du rouleau. Chacun des clients du Succubus ou des adhérents du FEAR a connu ça, à des degrés variés. L’objectif est limpide : faire en sorte que ce ne soit plus le cas des nouveaux.

« On aurait fait pareil pour toi. » Tu relèves les yeux et cherches à attraper son regard après avoir terminé son bandage. Heureusement que tu as pu boire avant de prendre ton service, sinon la tâche aurait été autrement plus difficile à accomplir sans avoir toi-même envie de lui sauter au cou. « Je veux dire, peu importe ses raisons, on essaie pas de mordre des quasi-inconnus si tout va bien dans sa vie, je pense qu’on peut être d’accord là-dessus. » Nonchalamment, tu te relèves et, après avoir bouclé la trousse de secours, t’en vas la remettre à sa place. « Je sais que c’est peut être un peu ironique étant donné que c’est toi à qui il a essayé d’arracher un bout de bras, mais dans l’histoire ton rencard est aussi la victime de quelque chose., tu vois ce que je veux dire ? »
Dans un réflexe encore tout à fait humain, tu soupires longuement. Calme et désabusée, comme si tu avais déjà sorti se discours des dizaines de fois, tu prends le temps de t’étirer longuement avant de reprendre. « Tout ça pour dire que Beau et Ziggy l’ont pas emmené dans la ruelle pour lui péter les genoux à coups de barres de fer, quoi. » Il n’est pas toujours évident de distinguer tes traits d’humour avec ton naturel pince-sans-rire, mais tu oses espérer que celle-ci fera au moins sourire… « Et ton nom, c’est quoi déjà ? Moi c’est Jade. Et tout le monde m’appelle Jade. »


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@ Keegan Jones

Keegan Jones
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Mar 12 Mar 2024 - 20:26
Sa réponse est si rapide qu’elle semble avoir été dite cent fois. Peut-être est-ce le cas. Peut-être que ce genre de situation est très courante ici, et que le staff a déjà tout un protocole en place pour les gérer. Qui sait. D’ailleurs, je doute que des médecins hospitaliers s’amusent à ficher qui que ce soit, ils ont sans doute bien d’autres choses à foutre. Quelque part, mon très léger cynisme me fait me dire que c’est surtout pour eux-mêmes et leur business qu’ils s’occupent des toxicos. Ça ferait mauvais genre pour leur établissement d’être connu pour des affaires de ce type-là. Sa phrase suivante étaye l’idée qu’ils ont déjà leurs propres méthodes pour s’occuper de ce genre de cas. J’imagine que c’est quelque chose d’assez commun dans les bars de ce quartier. Le terme de ‘semblable’ pique un peu ma curiosité. Il n’est pas si commun. La brume du doute s’étend de nouveau. Je repense à cette morsure si atypique qu’elle a masquée avec des bandages. Ces deux piqures nettes, trop nettes. Mais j’étais trop inquiet de perdre les pédales pour vraiment observer la blessure. J’ai peut-être mal vu. J’y jetterai sans doute un œil en rentrant, même si je suis probablement en train de délirer. La nuit a été bizarre et m’a un peu retourné la tête. Malgré tout, cette sale idée reste quelque part dans un coin de mon crâne.

J’observe ses gestes tandis qu’elle termine le bandage. Je souris à sa remarque. Ravi de savoir que je peux salement me droguer la gueule puis venir ici sans trop de craintes. Curieusement, ce n'était pas vraiment dans mes plans. Je ne l’interromps pas tandis qu’elle déroule le flux de ses pensées. Il ne va pas bien donc il se drogue et attaque les gens. La belle affaire. Étrange d’autant épiloguer là-dessus. Peut-être que tout cela résonne avec sa propre histoire et la rend particulièrement loquace sur le sujet. Difficile à dire. Au moins cet échange a permis à mon cœur de ralentir et j’ai retrouvé un calme tout relatif. On a échappé au pire. Je hausse les épaules en abandonnant un « Ouai, sans doute » d’assentiment. Disons que j’aurais quand même préféré que ça tombe sur quelqu’un d’autre. A sa dernière remarque, je lâche spontanément un « Bah encore heureux. » surpris. Quel connard voudrait qu’on tabasse quelqu’un dans une ruelle pour avoir fait un bad trip ? Il y avait peut-être de l’humour quelque part là-dedans. Du moins j’espère. Je me lève tandis qu’elle se présente et je lui réponds avec un sourire :

« Bah ravi de te rencontrer, Jade que tout le monde appelle Jade, moi c’est Keegan. »  Je fais un geste comme pour désigner le pansement et ajoute : « Et merci pour ça. »

J’abandonne un regard à la pièce triste. Les bruits étouffés de la musique et des éclats de voix festifs nous parviennent depuis l’autre côté de la porte, signalant que la nuit a repris son cours normal. Une soirée banale pour les gens de ce bar, visiblement. Une petite anecdote à raconter le lendemain. Je m’en serais clairement bien passé. Une seconde ou deux s’écoulent sans que je sache vraiment quoi dire. Après tout ça, je crois que je veux juste rentrer chez moi, m’écrouler sur le canapé et désinstaller Tinder.

« Bon. M’en veux pas, mais j’ai déjà perdu deux bières et ma soirée, donc je vais peut-être pas trainer dans le coin. » Probablement une de mes meilleures décisions de la soirée. « Et dites à l’autre que… » Que quoi ? Que ce n’est pas grave ? Que ça arrive ? D’arrêter la drogue ? De ne pas se droguer avant un rencard ? Que mordre les gens c’est pas gentil ? Mouai. Bof. Abandonnant, je fais un signe de la main comme pour lui dire de laisser tomber. « Ouai, non, lui dites rien. »

Triste nuit.
Au moins ça cicatrisera vite.
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Jade Fletcher
VAMPIRE
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Dim 14 Avr 2024 - 11:54

Hunger

feat. Keegan Jones
L’humour ne semble pas être l’un des points forts de ce Keegan. D’aucuns diraient que c’est le tien qui est trop douteux et que le moment n’est peut-être pas adapté. Tu leur rétorquerais qu’eux non plus ne sont pas de grands rigolos, seulement par principe, mais la vérité est qu’ils auraient sans doute raison. Enfin, rien de nouveau pour toi : tu sais que ton rapport au comique est assez particulier.
Déjà, tu ris très peu. Un réflexe pris assez tôt dans ta vie, de ne pas trop te laisser aller à des fragments de joie trop expressifs. Peu à peu, cette espèce de pudeur craintive s’est mue en quelque chose de moins noble et bien plus cynique. Une dérision froide, panique qui ne dit pas son nom d’une morte qui se sait en sursis.

Enfin, ça n’est pas très important. Tu as eu le temps de grandir depuis que Carmen t’a délivrée de la maladie. Tu es devenue une adulte, en quelque sorte. Tu es devenue responsable de toi-même et de ta propre envie de vivre. Alors tu ne fais pas grand cas de ces vestiges d’une psyché plus troublée, tout comme tu ne fais pas grand cas des réactions qu’ils suscitent tant que personne n’est blessé dans l’affaire.
Blessé dans ses sentiments, tu veux dire. Tu serais tout à fait capable d’ironiser sur la morsure de rien du tout que tu viens de lui panser.

« Pas de quoi, » réponds-tu simplement dans un haussement d’épaules nonchalant lorsque le grand blessé te remercie. Un moment de silence passe. Quelques secondes pendant lesquelles Keegan semble bien amèrement réévaluer certains choix de vie pendant que toi, tu le toises en te demandant quels choix en particulier.
Ca n’est pas de la curiosité mal placée, seulement un mauvais présentiment. Tu fais ce que les animaux font de mieux : reconnaître les signes d’une catastrophe avant qu’elle ne se produise. Certains appellent ça l’instinct, d’autres la faculté de reconnaître des schémas dont vous a doté l’évolution ; peu importe le nom qu’on donne finalement à ces pensées, tu les as déjà ignorées une fois il y a peu et tu ne comptes pas faire deux fois la même erreur dans la même soirée.
En dehors des murs du Succubus, il y a un bon paquet de personnes qui aimeraient voir le bar fermer ses portes. Voisins mécontents qui ne supportent ni de voir une couleur de cheveux extravagante ou deux hommes se tenir la main, vampires zélés et assoiffés de pouvoir… Il est ainsi de ton devoir de protéger l’établissement et sa clientèle de ceux qui leur veulent du mal et qui sauteraient sur n’importe quel prétexte pour cela. Il y a trop en jeu pour prendre ces choses à la légère, des choses plus grandes qu’une simple entreprise à la décoration douteuse. Il est question d’espoir et d’émancipation ; de s’autoriser à rêver d’un monde nouveau et plus beau que l’ancien.
Et puis, ce rade, c’est tout ce qu’il te reste. Tu ne supporterais pas qu’on essaie de te le prendre aussi.

Tu n’apprécies pas particulièrement le pouvoir que tu t’apprêtes à utiliser sur la victime de la soirée. C’est intrusif, c’est malsain, mais ça simplifie tant les choses. Il suffit d’un contact sur le front et la mémoire d’autrui s’ouvre à toi comme s’il s’agissait de tes propres souvenirs. « Attend une seconde, » lances-tu d’une voix neutre pour arrêter le jeune homme dans sa lancée vers la sortie. Tu fermes la distance qui vous sépare en quelques pas légers avant de reprendre. « T’as vraiment pas l’air en forme et je m’en voudrais de te laisser partir dans cet état. A défaut de reprendre une bière, reste quelques minutes de plus le temps qu’on te trouve quelque chose à manger, t’es tout pâlichon. » Assez ironique venant d’une vampire mais l’ironie fait partie intégrante de la vie, et de celle d’après.
Sans plus de simagrées ou de comédie, tu approches ton index et ton majeur de ton son front blanc comme une peau de bébé avec une certaine assurance. Ton geste n’est pas assez brusque pour vraiment provoquer un sursaut, mais tout de même suffisamment rapide pour ne pas lui laisser le temps de moufter.
Lorsque les échos de son esprit commencent à se jouer dans le tien, il ne faut qu’une fraction de seconde pour te féliciter d’avoir pris cette initiative, et une de plus pour comprendre que vous allez avoir un problème. Le premier étant que tu n’es qu’une jeune vampire, et que tu ne maîtrises pas encore assez ton pouvoir pour que ses sujets ne s’aperçoivent de rien lorsque tu explores les méandres de leur mémoire : tout ce que tu vois et ressens, ils le revivent aussi en même temps que toi. D’habitude ça ne pose pas vraiment de problème puisque tu scelles consciencieusement les souvenirs préjudiciables de la soirée. Or, à cet instant précis, tu vas avoir besoin de quelques explications supplémentaires avant de lâcher l’affaire.

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Keegan Jones
WENDIGO
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Mar 23 Avr 2024 - 9:33
Je rêve juste de me griller une clope, peut-être deux, et laisser cette nuit partir en fumée dans la nuit. Cet espoir-là meurt rapidement, brisé par les quelques mots de la barmaid. Quoi encore ? Je me retourne vers elle, intrigué, un peu dubitatif. Elle s’inquiète de mon état, visiblement. Je retiens un sourire amer quand elle parle de ‘quelque chose à manger’. Je doute qu’elle ait quoi que ce soit qui convient dans se réserve. Dans la salle principale pleine de fêtards, en revanche, elle a ce qu’il faut, mais je doute qu’elle aille débiter un client pour moi. L’image aurait presque pu être drôle, si la réalité n’avait pas été aussi cruelle, cynique, froide et triste.

« C’est bon, ça va aller. »

Mon ton passe de nonchalant à surpris quand ses doigts se posent sur moi.
Et puis c’est le chaos.

Un battement de paupière et je suis dans la réserve, le suivant je me revois en route pour ce rencard avorté. Le bruit de la rue et l’odeur du bitume mouillé sont si tangibles que je me croirais revenu une heure plus tôt. Le souvenir meurt et laisse sa place à un autre. Une image qui saute vers chez Anya, une ou deux heures plus tôt, quand elle se prépare pour son rencard, moi pour le mien. L’odeur de son parfum est trop entêtante, presque écœurante, et je me foutais de sa gueule parce qu’elle en avait renversé partout. Mais ce n’est pas réel, ça ne l’est plus, c’est du passé. Ce n’est pas normal. Entre deux bribes de mémoire fugace, mon regard se pose sur la barmaid. Est-ce sa faute ? Est-ce que c’est elle qui fait ça ? Et une autre scène s’impose à mon esprit. Le carrelage vieillot de la cuisine et une faim terrible. Et je me fige. Je sais ce qu’il s’est passé à ce moment-là. Je ne veux pas me souvenir de ça. Comme une machine impitoyable, les rouages de ma mémoire poursuivent. Je vois parfaitement la glacière que je tire de sa cachette. Le bruit si banal du zip qui s’ouvre pour dissimuler les paquets grotesques qui contiennent des morceaux d’êtres humains. La peur froide qui me bouffe les tripes en constatant qu’il en reste peu. Si peu. Un dégoût qui se mêle à une avidité terrible quand je saisis un des paquets pour le déballer. Je me rappelle la faim véhémente. Une faim si violente, terrible et brutale que je mords dans la chair crue sans pouvoir y résister, sentant mes dents se planter dans la viande molle et spongieuse. L’espace d’un instant le monde n’existe plus, rien que le goût ferreux qui envahit ma bouche et la satisfaction terrible d’avoir enfin quelque chose qui comble cette faim qui me ronge. C’est horrible. C’est merveilleux.

Je recule brusquement, essayant de m’arracher à tout ça. Mon esprit est un chaos qui cherche à comprendre ce qu’il s’est passé. Il a dû s’écouler une seconde, peut-être deux, guère plus. Je ne comprends pas ce qu’il s’est passé. J’ai des suppositions, trop. Tout ce que je sais, c'est qu'il n’y a rien de normal là-dedans. Mon regard accroche celui de Jade. C’est elle qui a fait ça ? Comment ce serait possible ? Ou alors j’ai fait un AVC ? Je ne pense pas que ça ressemble à ça. A la confusion se mêle la peur. Et si elle savait ? Non, c’est strictement impossible. Ce n’est pas rationnel. Parce que se transformer en monstre bouffeur de chair c’est rationnel peut être ? Trop de questions, trop peu de réponses. Le vacarme de mon cœur qui cogne trop fort accompagne les cris bruyants de mon esprit qui essaie de comprendre sans succès, contrastant fort avec le silence de la pièce.

Qu’est-ce que je dois faire ?

J’ai envie de fuir. Mais si elle sait quelque chose ? Personne ne doit savoir. Et si elle ne sait rien ? Je n’ai aucune idée de quoi faire dans cette situation. Je ne comprends même pas ce qu’il se passe. Je sens mes mains qui tremblent, je sens ce monstre terrible qui est prêt à se libérer pour qu’on puisse se défendre. Mais ce serait pire. Tellement pire. Il faut que je me calme. Je devrais partir.

Je regarde la barmaid, guettant la moindre réaction qui me donnerait une nouvelle information, quelque chose sur quoi m’appuyer pour prendre une décision. Je veux savoir ce qu’il se passe. Je veux savoir s’il se passe réellement quelque chose ou bien si j’ai simplement pété un câble.
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