One hell of a team [Elena]
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One hell of a team [Elena]

@ Keegan Jones

Keegan Jones
WENDIGO
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Mar 20 Fév 2024 - 20:42
« Tiens. » Anya relâche sur la table basse une liasse de papiers. La pile s’écrase sur le bois en un bruit un peu sourd et étouffé semblable au soupir d’un vieil arbre mutilé dans le glorieux but d’être transformé en documents pas oufs. « Je t’ai imprimé ça au boulot. »

J’avise une seconde la pile de CV d’un œil faussement étonné et j’ajoute avec une théâtralité qui ne trompe personne :

« Quoi ? Madame ‘je respecte les règles en tout temps et en tout lieu’ a utilisé l’imprimante de son bureau pour un truc qui n’est pas son boulot ? » J’accompagne mon ton faussement choqué d’un geste terriblement dramatique en portant ma main sur mon cœur et continue : « Est-ce que c’est une rébellion tardive ou alors t’en as vraiment plein le cul de me voir traîner dans ta baraque ? »

Ça la fait rire et elle vient s’affaler dans le canapé comme si sa journée de travail avait aspiré toute son âme. Voilà quelques jours que je traîne chez elle, dans sa jolie petite maison vieillotte mais bien entretenue, après qu’elle a gentiment accepté de m’héberger. Elle m’a sans doute sauvé la vie sur ce coup-là, même si elle l’ignore. Je ne lui ai pas vraiment raconté l’histoire, mais c’est une fille assez intelligente pour comprendre qu’il s’agissait de quelque chose de grave et que j’avais vraiment besoin d’un coup de main. Elle roule des yeux puis répond :

« Mais non, c’est pour t’aider, andouille. » Elle se redresse brusquement dans le canapé et reprend d’un air bravache : « Et est-ce que ce n’est pas la base de l’amitié que de voler son patron en imprimant des CV pour ses amis ? Hein ? Hein ! Je suis une vraie amie moi ! »

Et c’est probablement la chose plus vraie qui ait été dite à ce jour.

On ne peut pas vraiment dire que j’ai beaucoup avancé depuis que je suis arrivé à Vancouver. Quand Anya est là, je fais l’effort de paraître normal et de dire un paquet de conneries comme quand on était à la fac. Le reste du temps, quand la maison est vide et que seuls les courants d’airs m’accompagnent, je me morfonds, oscillant entre une faim grandissante qui me fait froid dans le dos, l’inquiétude pour l’avenir et la terreur du passé qui pourrait me rattraper. Un putain de cycle sans fin qui tourne en rond dans mon esprit sans que je puisse passer à autre chose. J’ai à peine réussi à vaguement regarder les offres de boulot qui trainaient sur le net, envoyant des mails sans convictions, sans aucun succès. Anya a décrété que ça marcherait mieux en y allant en personne parce que même si j’étais une vraie tête à claque par moment, j’étais quand même dans l’ensemble suffisamment sympa pour que les gens acceptent un CV sans me claquer directement la porte au nez. Je lui ai rétorqué que ce n’était pas lié au fait que j’étais sympa mais plutôt parce que j’étais globalement baisable et elle m’a jeté un livre à la tronche. Malgré tout, elle a quand même pris le temps d’imprimer les CV pour me les ramener.

« Merci. »

Et jamais un merci ne fut aussi sincère.

--
Je me suis levé avant midi.
Un vrai miracle.

Anya est partie avec le lever du soleil et j’ai passé les premières heures de ma journée à faire le tour d’internet pour noter scrupuleusement toutes les annonces qui me tombaient sous la main. Toutes. Sans distinction. Puis j’ai fait un tri entre celles qui me donneraient vraiment trop envie de me flinguer et les autres. J’ai quand même mes limites. Il en restait quelques-unes, allant des annonces les plus impossibles pour quelqu’un comme moi aux plus navrantes. J’ai checké les adresses, regardé par quartier et décidé de commencer par le downtown. Ce sera sans doute une journée perdue, mais au moins j’aurai tenté des trucs, et ce sera toujours mieux que de rester ici à me faire bouffer par des pensées intrusives.

Le trajet en bus n’était finalement pas si long et largement supportable quand on passe ce temps-là à scroller pour voir des vidéos débiles de ratons laveurs qui volent de la bouffe à des chats. J’ai encore un peu de mal à m'habituer à ce nouveau téléphone qui fonctionne de manière aléatoire et risque de se couper à tout moment. C’est un vieux mobile qui appartient à Anya, car elle est le type de personne prévoyante qui garde toujours tout un tas de trucs juste au cas où. Elle me l’a filé en apprenant que le mien était ‘accidentellement’ passé par la fenêtre durant mon interminable périple jusqu’à Vancouver. Malgré tout, le meurtre sauvage de mon précédent téléphone m’a permis d’avoir un nouveau numéro et plus de problèmes d’appels intempestifs de mon croque-mitaine personnel.

Je descends du bus et marche quelques temps avant de m’engager dans la rue commerçante déjà arpentée par tout un tas de gens venus profiter de leur jour de repos pour flâner négligemment. Ils marchent lentement en regardant les produits colorés exposés en vitrine, quelques maigres rayons de soleil réchauffant à peine ce matin d’hiver. Je manque de percuter quelqu’un en vérifiant l’adresse à laquelle je me rends. Un regard au téléphone, un autre au numéro accroché sur le bâtiment. Quelle idée de merde de commencer par un cabinet d’avocat. Quoi que ça peut être revigorant de se faire jeter de bon matin. J’entre dans le bâtiment et cherche le bon endroit, scrutant les noms placardés sur les portes, puis je finis par trouver. C’est stupide. J’ai l’impression de rien avoir à foutre ici. Avec le peu d’affaires que j’ai emporté, je ne pouvais pas vraiment faire d’effort vestimentaire et je me retrouve comme un con, fringué sans classe avec une liasse de CV sous le bras, devant cette porte. Le moins qu’on puisse dire c’est que je ne me fonds pas vraiment dans le paysage. J’avale un soupir et sonne malgré tout. Même la porte semble me gueuler je n’ai pas ma place ici. Et pourtant elle s’ouvre. Je me colle sur la tronche mon habituel sourire charmeur qui cache la misère, retiens un ‘salut’ pour articuler un :

« Bonjour. C’est bien ici que vous cherchez à recruter un assistant ? »
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Elena J. Lovecraft
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Mer 21 Fév 2024 - 3:29
« … Je comprends… Hm… Oui… Bien sûr… » Son smartphone collé contre l’oreille, l’anglaise faisait les cent pas dans l’espace clos de son bureau, ses petits escarpins noirs fouettant le sol dans un rythme régulier. « Dis-leur que je les recevrai jeudi en milieu d’après-midi… Non, bien entendu, je comprends leurs préoccupations. » Soupira-t-elle.

Elena leva les yeux au plafond. Logan était ce qui se rapprochait le plus d’un ami pour la jeune femme, l’un des rares à vrai dire. Catalyseur lui aussi, il avait rejoint les rangs du FSV presque en même temps qu’elle, à quelques semaines d’intervalle. Il était enquêteur, chargé de toutes sortes de missions pour le compte de leur organisation ; du marché noir, aux rituels de nécromancie prohibés, en passant par toutes sortes de mystères à élucider, ses journées étaient aussi variées qu’originales. Il était aussi en quelque sorte un garant de l’ordre pour leur communauté. Il n’était pas rare qu’il soit sollicité par des congénères pour tout et n’importe quoi.

En l’occurrence, des rumeurs se propageaient à la vitesse d’un incendie incontrôlable et nourrissaient la paranoïa collective. Entre les vampires, de plus en plus nombreux à investir la ville pour suppléer le déficit d’effectif au sein des Cercles, le climat encore tendu au sein de la Meute et les disparitions inexpliquées, Elena devait admettre que la psychose ambiante était de plus en plus difficile à gérer. Sans compter que toute cette agitation à Vancouver risquait d’attirer l’attention des mauvaises personnes sur eux… Il était donc de son devoir, et celui de ses collègues, d’écouter et rassurer au mieux leurs pairs pour éviter toute escalade inutile. Elle raccrocha finalement, déjà épuisée alors qu’elle n’avait pas encore commencé sa journée de travail officiellement.

Elena laissa couler l’ambre de ses yeux sur l’amoncellement effarant de documents qui jonchait la surface de son bureau. Un soupir découragé glissa entre ses lèvres. Identifier les dossiers par couleur ne suffisait plus, elle avait manifestement épuisé la palette. Les mains sur les hanches, une paire de lunettes de repos calé contre l’arête de son nez, elle sentait sa patience s’effriter dangereusement. C’était typiquement le genre de moment où elle remettait en question les fondements de son existence : pourquoi diable s’infliger une double activité ? Elle avisa d’un coup d’œil rapide l’heure sur sa montre. Elle avait un rendez-vous de préparation des témoins en milieu d’après-midi et impossible de mettre la main sur le dossier. Voilà qui s’annonçait comique.

Elle entreprit de fouiller parmi le désordre, se demandant comment elle pouvait avoir accumulé autant de papiers avec un bureau qui officiait à mi-temps seulement ? C’était invraisemblable. Son téléphone se mit à vibrer de nouveau. « Oui ? » Dans des gestes de plus en plus vifs, ses mains attrapaient, retournaient, balançaient des chemises. « Oui, bien sûr. A mon bureau même, à 15h. Tout est prêt, il ne manque plus que vous. » mentit sans remord la brune. Mais où était ce fichu dossier ?! Dans la manœuvre, elle laissa échapper son cellulaire qui glissa contre sa joue pour venir s’éclater bruyamment contre le parquet. « Merde ! » pesta dans un grognement la sorcière, les digues de son sang-froid cédant sous l’élan d’humeur qui lui empourpra les joues. Elle envoya valser d’un geste vif et rageur l’intégralité des papiers sur son bureau sous l’impulsion d’une bourrasque froide qui créa un tourbillon de feuilles colorées dans le bureau.

Si elle n’était pas parvenue à trouver ce qu’elle cherchait, aucun doute, l’espoir était désormais bel et bien perdu. Elle fit le constat des dégâts, en balayant d’un regard dépité la pièce. Au même moment, on frappait à la porte. Fichue matinée…

Elle alla ouvrir. Face à elle, un jeune homme, sans doute plus jeune qu’elle à première vue. Il affichait un sourire de vendeur de panneau photovoltaïque qui lui fit d’abord hausser un sourcil. Elle s’apprêtait à le congédier vite fait bien fait quand il mentionna l’annonce. Quelle annonce ? Oh, cette annonce !

« Oh bonjour. C’est bien ici, oui, je vous en prie, entrez ! » l’invita-t-elle en s’écartant. Son cabinet avait des proportions tout à fait normales, presque modestes même. Il y avait une grande pièce dans laquelle se trouvaient un sofa et une paire de fauteuils pour rendre l’attente moins désagréable, une table ovale qui permettait d’accueillir différents partis lors d’une négociation, un bureau de standardiste dans un coin et un simulacre de cuisine dans l’autre. Lorsqu’on traversait la salle, on pouvait au choix se rendre dans son propre bureau à gauche ou les toilettes à droite.

Elle fit signe au jeune homme de la suivre et le pria de s’asseoir sur l’un des fauteuils tandis qu’elle se dirigeait vers la cuisinette.

« Un verre d’eau ? Ou un thé peut-être ? » proposa-t-elle avec un sourire aimable. Elle savait que les entrevues étaient pour beaucoup une expérience angoissante. Tranquillement, elle actionna le bouton pour faire bouillir la théière, tandis qu’elle observait silencieusement le brun. « Je dois vous avouer que j’avais presque oublié avoir passé une annonce. » fit-elle en attrapant deux tasses et deux verres qu’elle déposa sur un plateau distraitement. « Parlez-moi de vous, je vous en prie. »
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@ Keegan Jones

Keegan Jones
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Mer 21 Fév 2024 - 17:07
Contre toutes attentes, la porte ne se claque pas contre ma gueule. La personne qui a ouvert semble surprise, mais elle me laisse entrer. C’est assez inattendu. Est-ce qu’elle m’a pris pour quelqu’un d’autre ? Est-ce que dans cinq minutes un gars bien propre sur lui va venir toquer à la porte pour dire que c’est lui qui a rendez-vous pour un entretien ? Ça me semble parfaitement crédible.

Je la suis à l’intérieur et en quelques coups d’œil je découvre le modeste cabinet d’avocat et sa propriétaire. Elle dispose d’une prestance certaine, comme tous ces gens bien éduqués et bien habillés qui arpentent des endroits calmes et propres. Pourtant il y a quelque chose d’autre que je ne saurais pas vraiment décrire. Une sensation bizarre, comme une pression venue d’un autre monde. C’est étrange, et peut-être que j’hallucine complétement. Pendant l’espace d’une seconde elle me fait vaguement penser à Silas, mais il ne s’agit sans doute que d’une aura que possèdent les gens intimidants. Je balaie cette idée de mon esprit tandis qu’elle m’invite à la suivre à travers les lieux. Au passage, j'entraperçois dans l’entrebâillement d’une porte un bureau croulant sous une montagne de dossiers empilés dans un total chaos. Soit il s’agit d’un système de classement révolutionnaire post-moderne, soit elle est en train de se noyer dans une paperasse vorace et trop abondante. Je me désintéresse du fatras de papier tandis qu’elle m’invite à m'asseoir en me proposant à boire. J’avise une seconde un des fauteuils à l’aspect confortable, m’installe et lui dis :

« La même chose que vous, ça ira très bien. »

Je suis plus adepte de café que de thé, mais je ne dis jamais non à quelque chose de gratuit. Je trouve le coin étonnement cosy, ce n’est pas vraiment comme ça que je me figurais le bureau d’une avocate. J’arque un sourcil quand elle dit avoir oublié l’existence de l’annonce. Donc elle ne m’a pas pris pour quelqu’un d’autre ? Etonnant. Je suis encore un peu plus surpris quand elle me demande de lui parler de moi. Je n’ai pas vraiment souvenir d’avoir un jour passé un véritable entretien d’embauche, à peine un dossier à remplir pour des boites d'intérim et tout juste un échange avec un manager ventripotent dans un fast-food. C’est donc à ça que ça ressemble ? Qu’est-ce que je vais bien pouvoir lui raconter ? Pourtant je ne suis pas franchement stressé. Ce n’est pas comme si je pensais avoir la moindre chance, mais ce sera sans doute la seule fois de ma vie où je pourrais boire un thé dans un cabinet d’avocat, alors autant en profiter. Je réfléchis une seconde et commence :

« Hum, je m’appelle Keegan Jones, je viens de débarquer à Vancouver. » C’est un début. Qu’est-ce qu’on est censé dire dans ce genre de cas ? ‘J’ai fui un horrible fils de pute et j’ai grave besoin d’un boulot’ ? Non. Probablement pas. A quoi je pourrais bien lui servir au juste ? J’hausse les épaules et enchaîne : « Honnêtement, j’ai probablement rien à foutre ici, c’est la première fois de ma vie que je vois un avocat, mais je sais ranger des dossiers, répondre au téléphone, être sympa avec des clients ou alors les envoyer se faire foutre si y'a besoin. » Ce n’est probablement pas ce qui se dit dans des entretiens pour ce genre de job, ni dans le fond ni dans la forme, mais ça a le mérite d’être sincère. Me souvenant des quelques mots présents sur l’annonce, je reprends : « Et je suis disponible. Genre maintenant, et à peu près tout le temps. »

Je ne sais pas vraiment quoi ajouter. La théière commence à faire ce bruit si caractéristique d’une eau qui chauffe doucement. Il n’y a rien de plus à dire. Mes qualifications pour ce poste sont inexistantes à part peut-être quelques missions de classement dans des entreprises en quelques jours d’intérim de-ci de-là. A ce stade, la pile de CV vaillamment imprimée par Anya aurait sans doute plus tendance à me desservir qu’à m’aider. Tant pis. Je m’enfonce un peu dans le fauteuil, étonnement à l’aise dans cette situation inédite, et demande avec un brin de curiosité dans la voix :

« C’est quel type de clients que vous avez ici ? »

Je n’y connais rien en cabinet d’avocat, mais j’imagine qu’ils ont tous des genres de spécialité. Il est assez peu probable que tout cela donne quelque chose, mais si jamais un miracle se produit, j’aimerais bien savoir si je vais croiser des tueurs ou autres criminels du genre. Cela dit, ce serait mortellement drôle de voir les pires ordures défiler ici pour prendre le thé dans un si joli endroit avec une femme si distinguée. Et puis j’imagine que parmi ce genre de clients se trouverait le genre de personnes dont la disparition serait plus bénéfique qu’autre chose. Ce n’est sans doute pas un bon signe que je commence déjà à penser à quel genre de personnes je pourrais essayer de bouffer sans que ce soit trop un problème. Peu importe, essayons de gérer un seul souci à la fois.
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Elena J. Lovecraft
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Jeu 22 Fév 2024 - 3:24
Un ourlet se dessina à la commissure de ses lèvres fermées. A mesure que le jeune homme se présentait avec plus de légèreté qu’elle n’en attendait, Elena l’écoutait d’une oreille distraite. Quelque chose l’interpellait. Et ce n’était pas la familiarité inhabituelle dont il faisait preuve, mais plutôt une impression curieuse qui la saisissait. Il y avait une vibration anormale autour d’eux, elle s’en rendait compte. Une sensation jusqu’alors étrangère qui teintait l’air d’une aura déconcertante. L’espace d’un instant, la brune se demanda ce qui pouvait la troubler. Du coin de l’œil, elle observa silencieusement le dénommé Keegan, une ombre suspicieuse voilant son regard. Un pressentiment aussi furtif qu’un battement de cœur. Elle secoua légèrement la tête pour dissiper ses pensées incohérentes. Voilà qu’elle aussi s’apprêtait à alimenter le délire général en prêtant des facultés surnaturelles au premier venu. Absurde.

« Excusez-moi, je ne me suis même pas présentée : Elena Lovecraft. » fit-elle en étirant son sourire dans une moue navrée. Cela dit, il n’y avait que son nom gravé sur la plaque à l’entrée, ce n’était pas difficile de faire le lien. Elle fit glisser ses longs doigts diaphanes autour de la hanse de la théière et entreprit précautionneusement de verser son contenu brûlant dans les deux tasses. Elle retrouva finalement le candidat, déposant le plateau sur la petite table entre eux, avant de s’asseoir à son tour les jambes croisées. Le thé fumant embaumait déjà la pièce d’un effluve subtile de bergamote.

« Et bien Keegan, je dois dire que c’est un résumé succinct mais non moins efficace. » fit-elle en le dévisageant longuement. Elle ôta sa paire de lunettes, se massa doucement l’arête du nez. « Pour être honnête avec vous, j’exerce à temps partiel, j’emploie le reste de mon temps dans des activés extra-professionnelles, disons… des hobbies qui occupent une portion importante dans mes semaines. Vous ne me verrez que les matins. » C’était un charmant euphémisme pour évoquer son emploi au FSV, mais c’était nécessaire. « Cela ne me laisse que peu de temps pour m’organiser : le suivi des rendez-vous, les délais administratifs, le courrier, le standard… Je suis submergée. » soupira la brune. Elle n’aimait pas l’admettre mais si elle voulait conserver cette activité – et pour une obscure raison elle y tenait réellement – elle devait accepter de faire appel à un quelqu’un pour la suppléer. « J’ai besoin de quelqu’un qui puisse mettre de l’ordre dans mes dossiers. Quelqu’un de flexible aussi, car il arrive que je sois contrainte de m’absenter en urgence. » Oui, les guerres de testostérones chez les loups-garous, ça ne posait pas de préavis et c’était un motif de mobilisation pour veiller à ce que ça ne déborde pas…

A sa question sur le profil de sa clientèle, elle haussa les épaules. « La gamme est large, mes habilitations me permettent de traiter à la fois du civil comme du pénal. Il m’arrive aussi de m’occuper des litiges à échelle d’entreprises. » Elle n’était pas arrêtée, elle étudiait chacun des dossiers qu’on lui présentait, mais elle reconnaissait qu’elle était sélective. « Rassurez-vous, on ne croise pas des cas de tueurs en série fréquemment à Vancouver. » sourit-elle. « À ce propos, qu’est-ce qui vous a conduit jusqu’ici ? Vous prévoyez une installation de longue durée ? » Ce serait contrariant de devoir recommencer un processus de recrutement, songea-t-elle.
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Keegan Jones
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Sam 24 Fév 2024 - 8:51
L’odeur du thé se répand dans la pièce à mesure que l'avocate remplit les tasses devant elle. Le parfum presque fleuri qui se dégage éloigne encore un peu plus ce lieu de l’image que j’avais des cabinets d’avocats froids et austères. Quand on se forge des idées sur la base de séries policières, la réalité est finalement bien plus banale. Bien plus douce aussi.

Alors qu’elle s’installe après avoir déposé les tasses, je tends la main pour saisir celle qui se trouve devant moi et manque de me brûler les doigts au passage. Apprenant rapidement de mes erreurs et contenant ma légère tendance à l'impatience, je laisse la tasse là où elle est, attendant que son contenu atteigne une température plus modérée.
Visiblement, mon court discours peu flatteur ne la convainc pas instantanément de me montrer la sortie. Ou bien s’agit-il là des grandes capacités de diplomatie des avocats ? Ne rien laisser paraître même quand tout est pitoyable ? Je l’écoute attentivement et retient même un haussement de sourcil à la mention de ses hobbies qui lui prendraient tant de temps. Quel genre de chose pourrait convaincre quelqu’un de sacrifier la moitié de ses revenus ? En l’espace d’une seconde beaucoup trop d’idées stupides et improbables me passent dans la tête, mais j’arrive à étouffer ces débilités et continue à l’écouter tandis qu’elle explique ce dont elle a besoin. Curieusement, les tâches qu’elle décrit semblent très ordinaires, bien loin des activités surqualifiées que j’aurais pu imaginer. Il y a peut-être un espoir finalement.

Elle répond à ma question et je ne comprends pas complètement l'étendue de sa réponse au sujet de sa clientèle, peinant déjà à bien faire la distinction entre civile et pénale, mais je saisis qu’elle touche un peu à tout. J’étouffe même un sourire contrit face à l'enchaînement entre sa remarque sur les tueurs en série et sa question sur ma venue ici. Quelle ironie de se dire que c’est précisément à cause d’un tueur en série que je me retrouve ici. Je ne m’étais jamais vraiment figuré ça en ces termes, mais étant donné la quantité de gens qu’il mangeait, il ne fait aucun doute que Silas rentre effectivement dans la catégorie des tueurs en série. Ça me colle instantanément un frisson de dégoût et de peur qui reviendra sans doute me hanter plus tard. Je me concentre sur sa question qui, bien que surprenante, paraît plutôt légitime. Il est parfaitement exclu que je lui dise la vérité. Et puis quelle gueule aurait la vérité au juste ? ‘Je suis venu ici parce que mon ex a essayé de me faire bouffer des morceaux d’enfants. Oui, parce que ce gros bâtard m’a transformé en monstre qui mange de la chair humaine. Evidemment. Ah et puis je ne sais pas si je vais pouvoir rester, parce que si je dois commencer à buter des gens pour les bouffer il faudra sans doute que je déménage, histoire de ne pas trop attirer l’attention.’ Je ne sais même pas si je dois en rire ou en faire une dépression. Je pourrais lui dire une partie de la vérité, passant sous silence cette improbable histoire de monstre à tête de cerf qui mange de la viande humaine, mais je ne sais pas si j’en ai vraiment envie. Même Anya ne sait rien de mon histoire avec Silas, ça l’aurait sans doute trop inquiétée. Ce n’est probablement pas le genre de choses qui se racontent dans une entrevue pour un job, en tout cas pas en détail. Après une seconde de silence et une décision impulsive, j’hausse les épaules et lui dis d’un ton avec une pointe de tristesse qui me surprend moi-même :

« J’ai fui quelqu’un d’horrible et j’espère bien jamais le revoir. » Et ça c’est l’euphémisme de l’année. Quoi que, tristement, il y a toujours une part de moi quelque part qui est assez nostalgique du temps qu’on passait ensemble au début, avant que tout se casse la gueule. Je chasse cette idée-là de mon esprit et enchaine d’un ton plus convaincu : « Et puis je pense pas aller ailleurs. Je trouve pas ça top de devoir tout recommencer dans un autre endroit. »  

Au moins je ne suis pas complètement seul. Je n’ai jamais eu l’ambition de changer de ville, de déménager dans d'autres pays. Je voulais une vie sympa et tranquille, pas une fuite permanente. Retenant un soupir, j’approche de nouveau ma main de la tasse qui s’est légèrement refroidie, mais sans doute pas assez pour espérer boire sans se cramer la gueule. Dommage. Abandonnant une nouvelle fois la tasse pour me réinstaller confortablement dans le fauteuil, je réfléchis une seconde à la situation, à son besoin d’aide et à mon besoin de thune. En posant mon regard dans le sien, je lui dis :

« Vous savez, j’ai vraiment besoin d’un job, même juste pour quelques jours, et j’ai pas franchement l’impression que ça se bouscule pour répondre à votre annonce. »  Pour qu’elle en ait oublié son existence, c’est bien qu’elle n’a pas eu d’autres contacts, non ? Je reprends : « Alors laissez-moi vous filer un coup de main. Et si jamais ça vous va pas, bah, vous pourrez toujours trouver quelqu’un d’autre. Vous pouvez même laisser votre annonce pour voir si d’autres personnes se pointent, mais au moins en attendant j’aurais mis un peu d’ordre dans vos papiers. »  Je ne cherche pas un poste pour faire carrière, juste de quoi renflouer un minimum mon compte en banque. Et si ça dure, alors tant mieux, mais même dans le cas contraire c’est mieux que rien. « Vous en dites quoi ? »
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Elena J. Lovecraft
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Ven 15 Mar 2024 - 4:28
Elena laissa échapper un demi sourire lorsque son jeune candidat fut sanctionné par son impatience. Les colonnes vaporeuses serpentaient encore au-dessus de la tasse lorsqu’il se ravisa par dépit. Elle continuait de l’observer avec beaucoup d’attention, encore troublée par l’aura curieux qui semblait suinter de chacun de ses pores et saturer l’air d’une énergie singulière. Pouvait-il s’agir d’un pair ? D’un lycan ? L’idée d’un vampire semblait exclue. Il pouvait aussi bien s’agir de quelqu’un qui s’ignorait, c’était plus courant qu’on ne le pensait. Elle isola ses réflexions tortueuses pour se concentrer sur l’essentiel, la raison de sa présence. Une moue indescriptible figea un instant ses lèvres pincées à la mention de l’individu horrible qu’il fuyait. De la pitié ? De la colère ? Du dégoût ? A vrai dire, il y avait un peu de tout ça. Impossible de ne pas sentir son sang frémir entre ses veines au souvenir de ses propres démons. Elle n’avait pas la prétention de savoir ce qu’il avait vécu, mais elle savait qu’une fuite, une rupture brutale avec ses racines n’était jamais motivée par une querelle anodine. C’était le fruit d’une longue et pénible accumulation, de la conviction terrible et irrépressible qu’il n’y avait pas d’alternative possible. Aussi, elle fut sincèrement touchée par sa situation.

« Je vois. » fit-elle en soupirant doucement. « Ce n’est pas simple non. Je suis passée par là il y a longtemps, j’ai une petite idée de ce que tu peux ressentir. » Le dépaysement, la solitude, les doutes… C’était pire évidemment lorsqu’il s’agissait d’un départ précipité, décidé par obligation. « Je suis originaire d’Angleterre. » précisa-t-elle alors avec un sourire empreint d’une certaine douceur. « J’ignore si tu connaissais déjà Vancouver auparavant, mais tu verras, c’est une ville agréable à vivre. » Les gens y étaient sereins, abordables. La ville offrait suffisamment de divertissements pour satisfaire tous les goûts. La nature environnante était époustouflante. Il y avait aussi une vie nocturne animée pour les amateurs.

Elena le scruta avec l’intensité cuivrée de son regard inébranlable. Elle avait une bonne intuition. Peut-être était-ce sa spontanéité, sa franchise ou cette vulnérabilité qu’elle devinait chez lui qui lui inspirait confiance. Ou alors son instinct protecteur qui se réveillait à la mention des difficultés rencontrées par Keegan. Quelles que soient ses réelles motivations, elle était prête à miser sur lui.

« Et j’ai sérieusement besoin d’aide, à l’évidence. » affirma la sorcière. « Mais ce dont j’ai besoin par-dessus tout, c’est de quelqu’un de confiance et qui sache faire preuve de discrétion. Dans ce domaine, c’est une qualité indispensable comme tu peux le deviner. » Préserver l’anonymat et l’intégrité de ses clients était la priorité d’Elena. Mais il n’y avait pas que ça bien sûr… « Par confiance, j’entends que j’aimerais que tu sois transparent avec moi lorsque c’est nécessaire. Évitons les mensonges, évitons les non-dits. Si quelque chose te pose un problème, viens m’en parler. Je suis plus ouverte d’esprit que ne le suggèrent mes sous-tasses à thé. » sourit-elle avec malice. Elle qui était méfiante par nature avait besoin de s’assurer que leur relation serait saine. Pour leur bien à tous les deux.

« Mes différentes activités en dehors du cabinet peuvent aussi nécessiter une certaine flexibilité dans mon agenda. Et comme je te l’ai dit, je n’exerce qu’à temps partiel, alors nous pourrons convenir d’un planning aménagé qui t’arrange aussi. » Il n’était pas question qu’il tienne le standard toute la journée, seul ici. « Idéalement, il serait préférable que tu sois disponible les matins de la semaine, du lundi au vendredi. Je peux te rémunérer, disons, 50% de plus que le salaire en vigueur pour le poste afin de compenser en partie. Et si tu ne trouves pas de second poste à temps partiel pour compléter tes revenus, nous pourrons toujours envisager des heures supplémentaires pour que tu ne sois pas dans une situation financière inconfortable. »

Elle était même prête à le payer à hauteur d’un temps plein si nécessaire, mais dans un premier temps, elle estimait que tout ne devait pas être offert sur un plateau en argent. Et puis, une seconde activité lui permettrait de se créer un réseau, de développer ses relations à Vancouver. Dans son cabinet, hélas, il n’aurait pas beaucoup d’opportunités de ce genre.

« Il se pourrait que j’aie besoin d’aide sur des dossiers divers aussi à l’occasion. » Des dossiers personnels. « Rien de très contraignant et je ne te demanderais pas d’aller nettoyer mes vitres si ça peut te rassurer. Ce serait toujours dans le registre administratif ou comptable. »Elle était aussi désordonnée dans sa paperasse personnelle qu’au bureau. La faute au temps qui lui manquait cruellement. « Si tout ceci te convient, alors c’est un oui pour moi. » lui annonça-t-elle. Elle se pencha pour attraper sa tasse et sceller ses lèvres contre la porcelaine pour boire une gorgée chaude. La balle était dans son camp.
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Keegan Jones
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Sam 16 Mar 2024 - 8:28
Sa réponse et la douceur du ton de sa voix qui remplit le cabinet me surprennent. J’ai toujours ces sales chuchotements qui me tournent dans la tête, me susurrant que les gens ne comprendraient pas ou ne me croiraient pas, à tel point que je suis authentiquement surpris par sa réaction si bienveillante. Son demi-aveux me réchaufferait presque le cœur, non pas que je sois particulièrement ravi à l’idée que d’autres personnes aient pu vivre une chose semblable, mais ça me donne l’impression d’être un peu moins seul, un peu moins perdu dans le noir. Je ne peux m’empêcher de faire écho à son sourire. J’ignore tout de son histoire et elle de la mienne, mais j’ai l’impression qu’elles se ressemblent. Je me dis que, comme elle, si j’avais pu fuir sur un autre continent je l’aurais sûrement fait, mais j’ai dû faire avec les quelques dollars qui me restaient. C’est presque touchant de l’entendre me dire que Vancouver n’est pas si mal, comme pour me rassurer. L’espace d’un instant j’en oublierais même que je suis là pour un job. Je ne m’attendais vraiment pas à ça.

Après quelques secondes silencieuses qui paraissent suspendues dans le temps, elle reprend, retournant au sujet qui nous intéresse aujourd’hui. J’écoute attentivement ses demandes qui me paraissent plutôt raisonnables. Je me doute que pour ce genre de travail, il vaut mieux ne pas s’amuser à ébruiter des informations sensibles. Concernant la transparence, j’ai généralement peu de difficultés à ouvrir ma gueule quand quelque chose m’emmerde, alors j’acquiesce à ses dires. Le planning qu’elle me décrit me paraît être idéal, me permettant de gagner de l’argent tout en ayant le temps de songer à mon problème d’ordre alimentaire. J’imagine que c’est quelque chose qui risque de me prendre pas mal de temps, et aussi une partie de mon âme, mais ça c’est une autre histoire. Je suis agréablement surpris quant au salaire. J’ai tant été habitué à me faire plumer par des patrons sans pitié qui ne pensent qu’à se remplir les poches tout en ne donnant que des miettes à leurs employés que je crois l’espace d’une seconde avoir mal entendu. Ses conditions s’égrènent et tout me parait correct, même si je suis curieux de ces dossiers divers dont elle parle. J’attends le ‘mais’ qui ajouterait la condition qui aurait fait fuir n’importe qui de sain d’esprit, cependant celui-ci ne vient pas. C’en est presque surprenant. Ainsi donc les bons jobs et les deals corrects existent en ce monde ?

Elle conclut, se disant prête à m’engager si ses conditions me conviennent. Voyant qu’elle parvient à boire son thé sans se brûler, je l’imite en attrapant à mon tour ma propre tasse et goûte à mon tour. C’est assez différent des petits sachets qu’Anya achète en supermarché. Ça ne vaut pas le café, mais finalement ce n’est pas si mal. Très simplement et avec un sourire, je lui demande :

« Je commence quand ? »

Toutes ses conditions sont idéales, et honnêtement j’aurai accepté même si tout ça avait été moins favorable. Alors même que je lui ai dit que j’étais prêt à accepter un peu n’importe quoi tant j’étais dans la merde, elle a tout de même choisi de ne pas en profiter et de rester correct. Je crois bien n’avoir jamais vu ça avant, d’autant plus dans le monde du travail. Pour la première fois depuis bien longtemps, j’ai l’impression d’être chanceux.
Finalement ma grosse pile de CV n’aura servi à rien, mais le moins que l’on puisse dire c’est que cette journée a été d’une redoutable efficacité.
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Elena J. Lovecraft
CATALYSEUR
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Mer 20 Mar 2024 - 3:38
Lorsqu’il accepta, sans manifester la moindre hésitation, un certain soulagement délesta l’anglaise d’un poids dont elle était heureuse de ne pas s’encombrer plus longtemps. L’exercice des entrevues pouvait être chronophage et assommant et elle aurait été contrariée d’y employer plus d’énergie que nécessaire. En somme, c’était une matinée efficace, de quoi rendre sa bonne humeur à la brune. Elle lui rendit son sourire, avant de se redresser pour lui tendre la main et sceller tacitement leur entente. Au même moment, au contact de sa peau pâle, cette sensation qui avait imprégné la pièce à son arrivée lui remonta de nouveau l’échine comme une couleuvre humide qui s’enroulait autour de sa colonne vertébrale. Un fragment de secondes, elle se demanda s’il l’avait senti lui aussi. La trentenaire préféra toutefois emmurer ses suspicions derrière un rideau opaque d’impassibilité.

« Eh bien, bienvenue Keegan. Je dois dire que je suis très confiante au sujet cette collaboration ! » fit-elle avec un enthousiasme non feint.

Quelque chose suscitait sa curiosité, ce n’était pas seulement cette impression étrange qui embaumait l’air, il y avait chez lui une sensibilité et une force à la fois qu’elle pouvait deviner. Quelque chose qui la renvoyait vingt-cinq ans en arrière, dans les ruelles miteuses de Londres. Une réminiscence abstraite, défragmentée de son passé. Un écho de celle qu’elle avait été autrefois : seule, perdue et vulnérable. Mais aussi audacieuse et persévérante, en dépit de l’univers qui tentait de la faire plier. Elena qui croyait aux rencontres prédestinées -elle en avait connu son lot - voulait croire à cette collision de deux histoires, de deux chemins. Et puis, le flux qu’elle ressentait, cette énergie qui saturait l’air ? Et s’il était comme elle ? Un catalyseur qui s’ignorait ? Le temps le leur dirait.

« Pour ce qui est du plan, voici ce que je te propose : tu m’aides à remettre un peu d’ordre dans mon bureau et retrouver un dossier au passage. Ensuite, je nous commande un lunch autour duquel nous pourrons faire connaissance et parler un peu plus de tes missions. » Une mise à l’étrier en douceur. Et l’occasion d’en découvrir plus sur lui. Accessoirement.

******

L’avocate était presque surprise qu’il n’ait pas tourné les talons et claqué la porte en découvrant le capharnaüm dans son bureau. D’autres auraient probablement été découragés. Ils étaient même parvenus à retrouver les documents pour son rendez-vous de l’après-midi, classés dans la mauvaise pochette... Elena en avait profité pour dégager l’espace de travail de Keegan afin qu’il y soit à son aise, et elle avait commencé à l’initier aux rudiments du poste : elle avait fait un résumé très concis, mais pratique de son métier, des différents cas sur lesquels ils pouvaient travailler. Du rôle de soutien qu’elle attendait de lui : dans la préparation des documents, le montage des dossiers pour le tribunal, dans la prise de notes lors des auditions des témoins, etc… Finalement, lorsqu’arriva le livreur et le déjeuner, il était presque treize heures.

« J’espère que je ne t’ai pas déjà ennuyé ? » questionna-t-elle avec un sourire en coin, ses yeux pétillants levés vers lui tandis qu’elle ôtait le couvercle de sa salade. « Le domaine juridique n’est pas le plus palpitant, je te l’accorde. Mais ne t’en fais pas, nous irons à ton rythme. » promit-elle. Elle avait passé les dix dernières années sans assistance, elle pouvait patienter encore le temps que son jeune disciple soit complètement opérationnel sans que ce soit un problème.

« Alors dis-moi, tu vis dans quel coin ? Tu n’es pas trop loin pour venir au moins ? » Elle enfonça sa fourchette dans une feuille de laitue condamnée. « Est-ce que tu avais des plans de carrière spécifiques avant de venir à Vancouver ? Tu faisais des études ? » interrogea-t-elle, curieuse.
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@ Keegan Jones

Keegan Jones
WENDIGO
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Ven 22 Mar 2024 - 8:19
Avec un sourire, une poignée de main et quelques mots, elle scelle notre accord. Si un jour on m’avait dit que je serai engagé dans un cabinet d’avocat, ne serait-ce que pour faire le café, ou le thé en l’occurrence, je n’y aurais jamais cru.

Elle propose un plan pour le reste de la matinée, me laissant deviner que la réponse à la question ‘Je commence quand ?’ est tout simplement ‘Maintenant. Vraiment tout de suite’. Il semblerait qu’elle ait urgemment besoin d’aide avec le fatras de dossiers que j’ai entraperçu en arrivant. Cette idée me fait sourire puis après avoir terminé le thé nous partons affronter sa monstruosité de papiers en désordre. Un sacré bordel, mais rien qui ne puisse intimider quelqu’un qui a vécu en colocation quasiment toute sa vie et généralement avec des gens plus mal organisés qu’une tornade. Au moins ici je ne vois nulle nourriture abandonnée colonisée par les moisissures et les fourmis. C’est déjà ça.

--

La matinée s’était bien passée et l’avocate m’a fourni une tonne d’explications sur ce qu’elle attendait exactement. Beaucoup de choses que je n’ai absolument jamais faites dans ma vie. Il ne fait aucun doute que le début sera peut-être un peu chaotique, mais j’ose espérer que j’apprends vite. Le plus dur sera sans doute de ne pas réagir aux histoires racontées par les témoins, je suis beaucoup trop bon public. L'arrivée du livreur marquant le début de la pause repas fut tout de même un moment de soulagement après cette matinée riche d’informations.

Une fois la nourriture récupérée, nous nous installons de nouveau dans les fauteuils. J’avise un instant mon repas, sachant pertinemment que ce n’est pas le genre de chose qui comblera la faim qui grandit des mes entrailles. Je ne peux pas m’en soucier maintenant. J’aimerais ne pas avoir à m’en soucier du tout. Heureusement, Elena prend la parole et m’aide à laisser de côté ces inquiétudes-là pour se focaliser sur des choses bien moins dangereuses. Je commence à manger et entre deux bouchées lui réponds :

« Ennuyé ? Non. » Peut-être un peu perdu et j’ai certainement déjà oublié une partie des informations qu’elle m’a donné tant il y en avait. Il ne fait aucun doute que je lui redemanderai des précisions en temps voulu. Très honnêtement, j’enchaine : « Mais je risque de poser pas mal de questions sur des trucs que tu as déjà dits. Ça fait beaucoup d’infos d’un coup. »

Et je ne suis clairement pas un génie avec une super mémoire qui enregistre tout ce qu’il voit et entend. Loin s’en faut. La conversation quitte rapidement les affres du travail pour se tourner vers des sujets plus communs. Une discussion banale lors d’une pause repas. Une bulle de normalité dans mon quotidien qui ne l’est plus depuis un certain temps.

« A Vancouver Est. » J’hausse les épaules. « C’est pas vraiment la porte à côté mais c’est pas si loin non plus. » Et puis maintenant que je vais avoir un salaire j’ai bon espoir de pouvoir libérer le canapé d’Anya. Sa question suivante m’arrache un rire surpris. Je crois qu’on ne vient vraiment pas du même milieu. « Un plan de carrière ? Chez moi les gens ont des jobs, pas des carrières. » C’est déjà un petit miracle que j’ai pu ne serait-ce que tenter la fac. Je n’ai même pas tenu un an, plus intéressé par les soirées étudiantes que par les cours. Inutile de soulever ce point en particulier. A mon tour, je lui demande : « Et toi ? Pourquoi le droit ? »

Si on en croit les films et les séries, il n’y a que deux types d’avocats : ceux qui le sont pour défendre la veuve et l’orphelin, et ceux qui ne sont là que pour la thune. Je pense qu’elle rentre plutôt dans la première catégorie. Son comportement, son cabinet modeste, son emploi du temps allégé pour ses ‘autres activités’, rien ici ne laisse penser qu’elle puisse être de ceux qui défendent les plus gros connards du monde pour gagner quelques billets. Malgré tout, je suis plutôt intéressé de savoir comment elle en est arrivée là.
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