La pierre philosophale. Mythe pour certains, légende pour beaucoup, rêve et objectif inatteignable pour tout alchimiste qui se respecte, n’a cessé de faire couler de l’encre depuis le 13ème siècle, époque de sa supposée création par Albert le Grand. Nul ne sait si c’est une fable inventée par son élève, Thomas d'Aquin, pour renforcer la notoriété de son maître et par la même la sienne, ou si l’histoire est vraie. Peu à peu reléguée au rang de légende, bien peu savent que l’histoire, si elle est vraie, n’est pas complète. Car Thomas d’Aquin ne profita jamais des bienfaits de la pierre, rapidement récupérée par une puissante famille d’alchimiste : les Visconti. Respectés dans les cercles d’influence magiques et famille noble exerçant son pouvoir sur la ville de Milan, les Visconti étaient l’un des clans magiques les plus puissants de l’Europe médiévale. Inquiets de l’utilisation d’un artefact avec un tel pouvoir, les Visconti subtilisèrent et cachèrent la pierre, tentant sans succès de la détruire pour que jamais un fou ne puisse s’en servir à ses propres fins. Incapables de venir à bout de la pierre, une tradition naquit alors dans la famille. La pierre devrait être confiée à un gardien qui veillerait sans cesse à la protéger et empêcher que quiconque découvre son existence et utilise ses pouvoirs. Offrant longévité et bonne santé à son gardien, la pierre devint la mission de la famille Visconti qui la porta jusqu’au 19ème siècle sans jamais faillir malgré les guerres et les catastrophes qui ravagèrent l’Europe durant cette longue période.

A sa naissance, Ginevra n’était nullement destinée à devenir la gardienne de la pierre. Fille d’un cousin de la branche secondaire, Leonti Visconti, elle vécut une enfance confortable, loin de la charge qu’était celle de gardien de la pierre philosophale. Elle découvrit naturellement son don vers ses douze ans. Une fierté pour ses parents, la famille voyant peu à peu les rangs de ses alchimistes péricliter depuis un siècle. Ils l’envoyèrent dans le fief de la famille principale où elle reçut toute l’éducation et l’entrainement que n’importe quel alchimiste respecté se devait de recevoir. Capable de comprendre de manière innée la composition de la matière Ginevra attira l’attention du patriarche de la famille. Si son don n’était pas des plus puissants, l’exploiter pourrait permettre de faire ce que personne n’avait pu faire avant : détruire la pierre. Elle fut entrainée et formée en ce sens, apprenant l’existence de la pierre et la mission ancestrale de sa famille et la responsabilité qui lui incombait à l’aube de ses treize ans. Si elle n’en comprit pas immédiatement le poids qui pesait sur ses épaules, l’intérêt du patriarche et son mentorat lui mirent une pression nouvelle.

Pendant des années, elle se focalisa sur son don, apprenant à en user pour comprendre  la matière sous de nombreuses formes. De façon intéressante, elle parvint à faire ce qu’elle nomma plus tard « l’harmonisation » de la matière. Plutôt que de laisser deux matières entrer en conflit, elle pouvait modifier la structure de leurs molécules pour les harmoniser l’une avec l’autre, voire en transformer une pour n'en former qu'une seule. Les applications étaient infinies aux yeux du patriarche, mais hélas, la pierre restait incompréhensible aux yeux de la jeune étudiante. Sa structure n’avait aucun sens et la rumeur disant qu’elle était constituée d’âmes et non de matière ne tarda pas à faire sens aux yeux de Ginevra. Mais cela ne pouvait exister dans ce monde. Ce n'était pas possible. Quel que fut le secret de la pierre, il était mort avec son créateur et il fallait percer ce mystère pour essayer de comprendre la véritable nature de l'artefact.

Pendant la décennie qui suivit, elle continua son apprentissage, aussi bien théorique que pratique. Son don s'affuta, devint plus précis et ses connaissances s'élargirent à de nombreuses autre formes de magie. Le patriarche plaçait beaucoup d'espoir en elle et son éducation était ce qui se faisait de mieux à l'époque. Mais tout le monde ne voyait pas cela d'un bon œil et des dissensions commencèrent lentement à se former au sein des Visconti. Depuis quelques décennies déjà, certains voulaient se servir du pouvoir de la pierre pour redonner à la famille sa gloire passée, perdue au fil des invasions, guerres et épidémies qui avaient touché l'Italie. Le Patriarche s'y était toujours opposé, mais ls schisme se creusait de plus en plus pour culminer le jour où Ginevra reçut la charge de la pierre.

Après 150 ans à la garder, le précédent gardien passa le flambeau pour goûter de nouveau à une existence plus sereine et normale. Au cours d'une cérémonie, Ginevra reçut la pierre et devint sa gardienne, acceptant solennellement la charge qui lui incombait. Comme tous les gardiens avant elle, elle fut liée par magie à la pierre, devenant de ce fait la seule à pouvoir bénéficier de ses bienfaits et à en supporter la charge, La faction s'opposant à cette décision frappa alors, blessant gravement la jeune femme et tuant le Patriarche par la même occasion. Pendant des années, une lutte sans merci opposa ceux souhaitant poursuivre la tradition et ceux voulant user du pouvoir de la pierre. La famille Visconti s'entre-déchira et nombreuses furent les victimes de conflit. Les partisans de la traditions l'emportèrent, mais la famille, exsangue, n'était plus que l'ombre d'elle-même. Pour éviter de susciter à nouveau la convoitise, Ginevra prit la décision de quitter le domaine familial. En 1832, elle quitta Milan et entama un long et périlleux voyage pour trouver un moyen de détruire la pierre une bonne fois pour toute.

Tandis que le monde tournait, que des guerres monstrueuses arrachaient les vies de millions d'hommes, de femmes et d'enfants, Ginevra étudiait, explorait, testait. Ne s'occupant nullement du reste du monde, elle se concentra sur sa seule mission, obtenant des savoirs gardés parfois jalousement par de nombreux peuples à travers le monde. Tous les trente ans, elle revenait à Milan, faisait un rapport et repartait aussitôt vers des pays qu'elle n'avait pas encore eu l'occasion de visiter. Ses arrêts les plus notables furent en chine, terre réputée pour son alchimie et son energomancie, la Russie pour ses traites de conjuration, l'inde, berceau de la Divination, ou encore le Moyen orient, riche en savoirs arcaniques et en artefact créés par l'Homme. Malgré tout cela, malgré toutes ses recherches et voyages, jamais elle ne trouva une piste solide pour ne serait-ce qu'érafler la pierre.

Lors de la Guerre Froide, elle arriva aux Etats-Unis pour tester de nouvelles idées apportés avec les récentes découvertes. L'uranium et le principe derrière les nouvelles bombes de l'humanité étaient un léger espoir pour l'Alchimiste. Pendant des années, elle étudia dans diverses universités américaines et fini par réussir à travailler dans un laboratoire de recherche sur l'élaboration d'engin nucléaire dans le cadre civil. A l'insu des autres chercheurs, elle étudia l'uranium au plus près, inspectant sa composition et ses effets. La pierre la protégeait des effets des radiation à long terme, mais chaque exposition était plus douloureuse que la précédente et il devint difficile de masquer les signes de brulures de radiation lorsqu'elle débordait de ses vêtements. Après plusieurs semaines, elle parvint finalement à mettre le doigt sur quelque chose. Il y avait une infime, très infime ressemblance entre la pierre et un composé à base d'uranium enrichi. Hélas, incapable de s'en procurer par elle-même, toute recherche au-delà allait s'avérer presque impossible et avoir le gouvernement américain sur le dos ne l'arrangeait guère. Elle quitta le laboratoire et les USA pour aller en France et se fit recruter par l'ingénierie militaire au vu de son expertise rapportée des Etats-unis. Elle participa aux essais atomiques français et en profita pour tenter le tout pour le tout. Elle apprit donc qu'une explosion nucléaire n'était pas suffisant pour détruire la pierre et que la récupérer était un calvaire au-delà de tout ce qu'elle avait connu jusque-là à cause des radiations et de la protection mise en place autour de la zone d'essai. Elle abandonna ses recherches en ce sens malgré le bref espoir et continua de chercher des réponses dans la magie plutôt que la science.

C'est ainsi qu'elle arriva à Vancouver en 2018, reprenant son identité originelle après 100 ans passés sous divers pseudonyme. Elle se fit rapidement connaître des autorités magiques en place, se faisant passer pour une simple chercheuse curieuses des applications du chamanisme endémique à cette région et s'installa dans un maison en bordure de la ville. Elle s'y fit installer tout ce dont elle avait besoin et continua ses recherches tout en apportant son aide à la FSV, devenant par la même une consultante extérieure à l'organisation et publiant quelques travaux mélangeant science et magie destinés à un public d'alchimiste. Pour autant qu'elle sache, personne ne sait qui elle est ni qu'elle possède une pierre philosophale. Elle se contente de mener des recherches derrière les murs de sa maison. Ces derniers temps, à force de ressentir les effets secondaires de la longévité anormale qu'elle possède, elle se prend à chercher un apprenti pour l'assister et peut-être partager son fardeau. Mais les alchimistes ne courent pas les rues à Vancouver...

Comment ça déchire.  

J’essayais de lire un peu au fur et à mesure (oui je stalke les fiches postées pour voir si y a de nouveaux trucs   ) et chaque ajout était trop bien. Je suis super intrigué de voir comment toute cette histoire va évoluer. Hâte de continuer à te lire !